Un nom russe, une couv représentant une peinture russe, que vient foutre Azazel là dedans ? Y aurait-il du rififi satanique chez l'ami Ivan ?
Vers 1875, en Russie, à Petersbourg, un suicide parvient à l'administration policière. Un suicide guère étonnant à cette époque, la mode est au romantisme, et nombre d'étudiants succombent à cette passion échevelée et finissent leurs jours dans un élan romantique, qui laisse de beaux poèmes et une ambiance particulière.
C'est bien cette ambiance qu'on retrouve dans ce livre. Le romantisme slave, la belle époque, pré-insurrectionnelle, où au romantisme lyrique se mêle le romantisme politique. Les premiers anarchistes rôdent. Vous noterez d'ailleurs le subtil jeu de mots de l'auteur sur son pseudonyme. Boris Akounine, Bakounine, théoricien de l'anarchisme... L'auteur est par ailleurs géorgien (tiens donc, comme Staline) mais habite à Moscou. Il reste un auteur slave.
Et c'est cet esprit slave qu'on retrouve dans le livre. Attention, ce n'est ni Dostoïevski ni Gogol. C'est un contemporain qui ici se rapproche largement plus de... Conan Doyle ou Jean Ray !
Car oui, derrière ce suicide, se cache une machination. Un agent peu gradé va mener l'enquête, de Petersbourg à Londres, en passant par Paris et Moscou, et découvrir une sombre machination, dans une entreprise qui dépasse les frontières.
Azazel, justement, apporte la note fantastique et occulte, chère à Jean Ray et ses Harry Dickson. Le pot aux roses sera découvert, dans un quasi complot mondial, tissé comme une toile d'araignée, comme les tentacules d'une pieuvre, préfigurant la chute du monde moderne, et la première guerre mondiale.
On est aussi très proche du Sherlock Holmes cinématographique de Guy Ritchie. Azazel est moins riche en steampunk, mais l'esprit est à la science et à cette période où tout devenait incroyablement possible, au travers de machineries complexes.
Autant dire que le bouquin est un régal à lire. Malheureusement, je trouve que la fin est expédiée un poil rapidement. D'ailleurs, j'ai capté le truc à moitié de livre, moi qui d'habitude me laisse porter sans trop chercher à comprendre, pour apprécier le dénouement final. Ca doit être l'esprit des Holmes et Dickson qui finit par prendre sur moi... Nous noterons tout de même une fin qui n'est pas un happy end du tout, et renvoie encore une fois à cet esprit slave, que Sylvain Tesson rappelait au travers du "pofigisme" : "demain sera pire qu'aujourd'hui... alors laissez-nous boire maintenant".
Azazel est un bon petit bouquin à lire, une version slave d'Harry Dickson, Sherlock Holmes ou encore Arsène Lupin, pour l'ambiance.