Un Jean Gabin sous la direction de Grangier, adapté d'un roman de Simenon par Audiard, quand on tombe dessus, y a de quoi se réjouir, non ?
jean gabin
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Le Sang à la Tête
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Leur dernière nuit
Ouais, c'est la période de Noël, du Réveillon, c'est les vacances, on glande en peignoir jusqu'à tard dans la matinée, on se couche à pas d'heure, et pour éviter les merdes qu'ils passent à la télé les après-midi (non mais un seul Pierre Richard ! Et les Don Camillo habituels sur France 3, spécialement pour les fêtes, jours fériés, jours pairs, jours impairs, bref, on les connaît par cœur, et maldito, faut se fader les mauvais dessins animés par ordinateur, et rien qui donne envie de se goinfrer des oranges et des chocolats des étrennes...), le moment est propice pour se faire un bon Jean Gabin. J'hésitais à revoir avec plaisir un Gentleman d'Epson, un Archimède, ou bien un Jardinier d'Argenteuil, voire une affaire St Fiacre un peu plus sérieuse de la filmo de M'sieur Moncorgé, et puis j'ai trouvé une manne. Une série de films que je ne connaissais pas du tout. Alors j'ai commencé avec Leur dernière Nuit.
Daté de 1953 et réalisé par Georges Lacombe, il faut bien l'avouer, Leur dernière Nuit est un film mineur dans la carrière de Jean Gabin. Jean Gabin campe le rôle d'un bibliothécaire poli, qui crèche dans une pension de famille très correcte, mais la nuit, il est Monsieur Fernand et prépare des coups pour braquer du titre au porteur et plier des gros pascals dans ses poches de veste. Pas de bol, il se fait pincer lors d'un gros coup, et Madeleine Robinson, petite professeur d'anglais, tombée amoureuse du bonhomme, va l'aider à organiser sa fuite.
Gabin a toujours un peu le même rôle, l'homme honnête bien mis, puis le truand qui en a revendre de la chienne de vie. En cavale, insupporté par les cornes de brume, il lâche tout, pourquoi il est passé de petit médecin de province, fils d'ouvriers peu friqués, obligé suite à un avortement de complaisance qui a mal tourné, à changer de vie, et préférer la mauvaise vie... Moins convaincant que dans le Jour se lève, mais on apprécie. Un final typique du ciné français des années 50, le truand ne gagne pas à la fin, et disparait dans les eaux grises de la Seine... Une fin qui rappelle celle du Rouge est mis.
Sympa, Madeleine va faire un point à la chaussette trouée de Gabin, mais elle prendra soin
de nettoyer à l'eau la dite chaussette avant d'intervenir.Et les décors, entre chambre de pension, chambre d'hôtel, commissariat, marché de Paris, rues encadrées de flics, on est en terrain connu pour le Gabin voyou. Des scènes qui pourraient être interchangeables avec autant de films. Et pourtant, Gabin est là, il porte le film, la Madeleine Robinson est pas mal non plus, Robert Dalban avant que ses cheveux ne virent au gris joue le rôle du commissaire qui use de méthodes efficaces et peu sensibles envers la pauvre Mado, il nous rappelle ce qu'il jouera huit ans plus tard dans le Cave se rebiffe.
- Bah qu'est-ce qu'il y a mon lapin, je te plais pas ?
- Si tu me plais. Mais arrête de m'appeler "mon lapin"J'ai l'air de faire la fine bouche avec ce film, mais non en fait, j'ai beaucoup aimé. Beaucoup aimé revoir Gabin dans un film que je n'avais pas encore découvert, et simplement, voir un film avec Jean Gabin. Il fait du Gabin. Il se tient bien droit, il fait du charme aux femmes, envoie chier les souillons et les bonnes (sa première réplique est d'ailleurs poilante, à recadrer la serveuse sur son parfum trop prononcé), il bouffe comme d'habitude, n'oublie pas de complimenter Madeleine Robinson sur son pâté de lapin et s'en jette un dès qu'il peut. En un mot comme en cent : Jean Gabin.
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Le Rouge est mis - Auguste le Breton
Louis Bertain, dit le Blond, fait partie d'une bande qui attaquent quelques convoyeurs pour piquer de l'oseille. Il est entouré de Raymond, dit le Matelot, Pepito, le gitan et Fredo, dit Keskidi, souvenir de son époque aux Amériques où, n'entravant pas ce que disaient les Amerloques, il demandait "qu'est-ce qu'y dit ?" à son associé, et le surnom lui était resté. Le Blond la ramène pas trop, les flics l'ont pas dans le collimateur. Il fait ses coups d'éclat, sans qu'on sache qui chercher. C'est sans compter Pepito qui a la gâchette facile. Alors quand ils braquent un fourgon sur la route de Dourdan, les chauffeurs sont liquidés, deux motards de la police qui les filaient y passent aussi, et un couple de fermiers est envoyé ad patres. Les flics sont sur les dents et trouvent vite les suspects...
Pas de chance, Pierre, le frère de Louis s'est fait gauler par les flics en repartant de chez sa poule. Interdiction de séjour à Paris, il aurait dû prendre patience, mais l'amour... les flics aimeraient bien qu'il balance. Et comme il entend une conversation entre Louis et le gitan sur l'attaque du fourgon, il a ses p'tits nerfs qui craquent quand il lit dans le journal le compte-rendu de l'expédition. De là à balancer les copains ?Un petit polar classique de la part d'Auguste le Breton, à qui l'on doit (entre autres) la série des Rififi à... et le Clan des Siciliens, Razzia sur la Schnouf, eux aussi adaptés à l'écran. Polar classique certes, mais écrit en argot, avec quelques indications utiles pour comprendre certaines locutions issues du sabir gitan ! Peut-être tombées en désuétude depuis... C'est le cas de beaucoup d'expressions, mais elles sont bien plus savoureuses que l'argot du ghetto des rigolos d'aujourd'hui !
Le style me rappelle un peu Albert Simonin et son Touchez pas au grisbi ! plus violent et dur que le film...Ce livre a été porté à l'écran, comme les deux précédemment cités. Avec Jean Gabin dans le rôle titre, évidemment. Et, coïncidence, c'est quand je termine la dernière page du livre que je me dis que je reverrais bien le film, eh bien deux jours plus tard, il passe à la télé. Formidable !
Plutôt sympa ce blog, j'arrive à caser Jean Gabin dans une chronique d'un bouquin, on joint l'utile à l'agréable !
Si le bouquin date de 1954, le film date de 1957. Le film ressemble par moments à une adaptation fidèle du bouquin, mais édulcore certains passages, ou les transforme. Au casting, on retrouve les fidèles de Gabin : Lino Ventura, Paul Frankeur, Albert Dinan et même Jacques Marin, en éternel troisième rôle, et cette fois, sans moustache ! On reconnaît en tout cas sa voix typique (toute une aventure à retrouver tous les doublages de films et de dessins animés qu'il a réalisés !). Apparaissent au casting également deux jeunes premiers, promis à une longue carrière : Jean-Pierre Mocky et Annie Girardot !
Comme je l'ai dit, le film reprend la trame du livre dans les grandes largeurs. Quelques aménagements ont été réalisés pour que le héros soit plus gabinisé. Dans le livre, il doit avoir une trentaine d'années. Ouch, en 1957, Jean Gabin a 53 ans ! Et de simple voyou avec un beau costard qui distribue les pascals à tout va, il devient voyou avec une affaire en couverture, histoire de râler sur le coût de la vie. Il est patron d'un garage. Il y a une inévitable scène où Gabin bouffe dans un restau, mais la scène est vite terminée. On voit apparaître quelques chevaux, une grande passion de Gabin. Les scènes de violence sont amenuisées également. On est tout de même en 1957, quand quelqu'un se mange une bastos, il se tient le bide, et glisse sur le sol en en faisant des caisses. C'est comme ça. Malgré tout, on échappe à plusieurs morts du bouquin, et la principale scène violente, de l'attaque du fourgon, alterne passages épiques (les motards qui se font tuer en pleine course, on se croirait dans Mad Max !) et contrechamps timides, quand les fermiers se font dézinguer. Gabin a un geste de surprise à chaque meurtre, et essaie de retenir Pepito. Dans le livre il s'en fout. Mais le film est différent... D'ailleurs les motards ne meurent pas. "- Son casque lui a certainement sauvé la vie. - Et le premier ? - Il s'en tirera".
A côté de ça, le langage est plutôt vert. Ca parle argot, mais moins que dans le bouquin. Gabin traite la fiancée de son frère de salope, et lui file une tarte. Faut dire, dans cet univers de la pègre, les femmes sont souvent des putes, ou d'anciennes michetonneuses. Y a même une scène calquée du livre, où un homosexuel qui s'est fait ramasser par les flics passe un message à Gabin, en roulant des yeux et en prenant des manières. Une "lope" comme on les appelait alors. Gabin lui file cent sacs pour qu'il aille "s'acheter une nouvelle pochette". Venant d'un gars qui trainait trop près d'un édicule... Je laisse les plus jeunes chercher la signification de tout ça dans un dictionnaire, eh eh. Les thuriféraires actuels de la sodomie placée au rang de style de vie à être accepté et loué par tous doivent en faire une syncope, ah ah !
Et notons, si le film reste fidèle au livre dans sa fin, que c'est une des rares fois où le personnage joué par Jean Gabin meurt...
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Le Drapeau noir flotte sur la Marmite
Dans la banlieue parisienne, le petit monde des employés de la SNCF est un peu chamboulé par le prix attribué à Pierre Simonet pour sa maquette de bateau, réalisée en alumettes. Une idée germe dans l'esprit du chef Volabruque, à deux ans de la retraite : se reconvertir dans la pêche à la dorade, à Dieppe. Et c'est Simonet qui va lui construire ! Rien de moins !
Simonet est bien embêté, et se demande comment il va pouvoir faire ça. Il se rappelle d'un oncle, marin de carrière, qui pourrait l'aider, le commandant Victor Ploubaz. Le voilà invité à Villeneuve St Georges pour diriger les opérations...
Construire un Sloop Marconi en mettant les cheminots au boulot (je me rends bien compte de l'ironie de cette phrase), et ce, dans le jardin du pauvre Simonet qui s'écrase devant l'attitude bourrue et autoritaire du tonton.Seulement... le tonton, il a été dans la marine... mais aux cuisines. La seule tempête qu'il a traversée, c'est celle d'une soupe à la tomate qui tourne ! Quand le bateau est construit, il va bien avoir du mal à faire encore illusion... et c'est pas ces putains de vis de sextan qui vont pouvoir le laisser berner son monde...
Gabin est évidemment Victor Ploubaz, le vieux loup de mer mythomane, entre le baron de l'écluse et Archimède le clochard, plein d'imagination, qui enveloppe son mensonge dans une gouaille qui tait les discussions. Avec Audiard au scénario et à la réalisation, c'est un festival. D'autant qu'on a une belle brochette d'acteurs et petits rôles tout autour : André Pousse avec une moustache, Jean Carmet, Claude Piéplu, Ginette Leclerc (qu'on retrouve dans le Cave se rebiffe, et le Corbeau de 1943, dans une jeunesse et un rôle tout à fait différent), et Jacques Marin, l'éternel second rôle habitué des films de Gabin. Il ne manquait plus que Noel Roquevert pour compléter le tableau. Rappelons aussi que le matériau originel, "il était un petit navire", est un bouquin de René Fallet... L'esprit est donc à la bonne humeur.
A la bonne humeur, et une réalisation assez classique, beaucoup moins foutraque que Faut pas prendre les enfants du bon dieu pour des canards sauvages.A l'époque, le film n'a pas eu un succès retentissant, dommage, car si on ne rit pas aux éclats, et on sent un peu le coup venir, le film est empreint d'une bonne humeur et d'un bon esprit, nous replongeant dans une époque encore une fois révolue, où les cheminots bossaient au rythme des locomotives, se tenaient les coudes entre collègues, le patron, même si un peu chahuté par les gars, n'était pas un salaud absolu, et proche des cheminots, et les gens étaient polis, pas comme maintenant avec leurs chewing gommes et leur rythme et blouse.
En bonus une entrevue avec Pierre Tchernia à la sortie du film, où l'on apprend l'origine du nom du film, et la provenance de la casquette de Gabin dans le film :
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La Horse
Il fait bon vivre en 1970 dans le bocage normand. Des terres, des vaches, un corps de ferme, Jean Gabin mène sa famille en bon patriarche qu'il est. Il est un peu vieux jeu, un peu méprisant du beau-fils, la pièce rapportée, il sourit pas souvent, mais bon.
Seulement, on est en 70 et les jeunes, ils ont pas fait la guerre, ils ont des cheveux longs et ils rêvent que de coca cola et de vie facile... alors quand le petit-fils de Jean Gabin fait une connerie, ça la fout mal. Ouaip, il déconne avec la drogue. La horse, comme dit Bien Phu, l'ancien de la guerre d'Indo, qui a vu des copains succomber à ce mal enjôleur, la horse, le cheval... l'héroïne.
Alors quand le gamin il oublie un peu de payer aux truands ce qu'il leur doit... les truands, ils sont comme Pizza Hut, ils viennent chez toi. Ca joue le margoulin, mais pas de bol, ils tombent sur Jean Gabin. Jean Gabin, le bizness, la gue-dro, le blé, les putes, il en a un peu rien à foutre, c'est pas ça qui va traire les vaches. Alors en plus quand le Parigot il vient le menacer, ni une ni deux, Jean Gabin il défouraille à sec. Une bastos à sanglier à 5 mètres, le dealer, il est high in the sky.
Fin de l'histoire.
Seulement... les bad guys, on leur doit du blé, et en plus ils ont un gus sur le carreau. Ils laissent pas tomber comme ça. Ils vont venir à plusieurs cette fois... Et ça va y aller de l'intimidation. Incendie dans la grange à foin, rodéo avec les vaches qui vont en calter de trouille... jusqu'à l'irréparable... la petite-fille de Jean Gabin (dans le film, Auguste Maroilleur) va tâter du mandrin de voyou et de la paluche de repris de justice, pendant que les bons paysans sont à sortir leurs vaches affolées des étangs. Jean Gabin, il desserre pas les dents. Il encaisse sans broncher. Et tant pis si la famille accepte pas. Jean Gabin, il sait qu'il n'y a qu'une seule issue à tout ça. Et les grenades de Bien Phu, elles vont pas être de trop. Déjà qu'il a collé le petit-fils à la cave, pour pas qu'il fasse de connerie...
Dans un final à la Horde Sauvage, Jean Gabin et les siens vont dessouder du soudard, au fusil de chasse et la grenade... et les gendarmes dans tout ça ? Pas vu pas pris, Jean Gabin il déroge pas à sa règle de bon paysan.
La Horse, c'est un film qui mélange un monde qui prend fin, celui de la paysannerie, des traditions, et de Jean Gabin, d'ailleurs, qui a égayé les cinoches depuis 30 ans, et qui arrive un peu en fin de course. C'est l'aube d'un nouveau monde, moderne, implacable, cruel, les nouveaux voyous, la drogue partout, même dans le trou du cul de la Normandie... La confrontation de ces deux mondes, du Charles Bronson à la française.