Depuis mars 2013, une équipe d’archéologues de l’Inrap explore, sur prescription de l’État (Drac Provence-Alpes-Côte-d’Azur), 1,8 hectare situé dans la ZAC des Vigneaux à Cuges-les-Pins (Bouches-du-Rhône). Cette fouille s’inscrit dans le cadre d’un projet d’aménagement confié à la SAEMPA par la communauté d’agglomération du Pays d’Aubagne et de l’Étoile. Outre un habitat néolithique, les chercheurs exhument actuellement une sépulture paléolithique.
Une rare sépulture du Paléolithique final
Seules 200 sépultures de cette période ont été exhumées en Europe, de l’Atlantique à l’Oural. Celle actuellement en cours de fouille à Cuges-les-Pins est attribuée à la fin du Paléolithique, c'est-à-dire entre environ 11 000 et 12 000 ans avant notre ère.
Elle constitue déjà une découverte d’exception. Ce squelette n’est que partiellement dégagé et beaucoup de questions demeurent. Toutefois, des silex taillés et un foyer témoignent d’un campement de plein air probablement contemporain de la sépulture. De tels campements de plaine sont fort rares car plus difficilement décelables que les habitats sous abri ou en grotte.
La culture épigravettienne
Les outils en silex présents dans le comblement de la tombe sont caractéristiques de l’Épigravettien (ou Tardigravettien), un faciès culturel présent en Europe méditerranéenne, centrale et orientale à la fin du Paléolithique supérieur. Une datation Carbone 14, actuellement en cours, précisera la chronologie de cette sépulture, la première de cette culture en France.
Dans la continuité du Gravettien (27 000 à 20 000 ans avant notre ère), les outillages de l’Épigravettien (20 000 à 10 000 ans avant notre ère) comportent des pointes de silex particulières : des armatures (éléments destinés à être emmanchés sur des projectiles utilisés pour la chasse) réalisées à partir de petites lamelles rectilignes et transformées par retouche abrupte formant un dos opposé au tranchant. Les pointes mises au jour à Cuges-les-Pins correspondraient à l’Épigravettien final (environ 12 000 à 11 000 ans avant notre ère).
Les pratiques funéraires de l’Épigravettien récent ou final sont bien documentées dans la péninsule italienne, de la Vénétie à la Sicile. Huit sites y ont livré des inhumations correspondant à près d’une quarantaine d’individus. Toutes ces sépultures se trouvent toutefois dans des grottes ou des abris sous-roche, celle de Cuges-les-Pins est à ce jour la seule connue dans un contexte de plein air.
Dans les sépultures italiennes, les défunts sont généralement ensevelis allongés sur le dos et accompagnés de parures, d’outils, de vestiges de faune et d’ocre. Il n’est pas possible à ce stade de préciser si celui de Cuges-les-Pins est associé à un mobilier funéraire, ni de déterminer ses caractéristiques anthropologiques (âge, sexe, pathologie ou blessures éventuelles…). Les sédiments situés au-dessus du corps ont cependant livré trois petites perles, coquilles perforées d’un gastéropode méditerranéen : Cyclope neritea. Plus de mille perles de ce type ont été mises au jour dans la sépulture double épigravettienne de la Grotte des Enfants, de Balzi Rossi, à Vintimille (Ligurie)…
Un vaste site néolithique. Quelques repères chronologiques
Une occupation postérieure à la sépulture, du Néolithique, est aussi présente sur ce site. Céramiques, silex, outils en os, meules, éléments de parure, etc. permettent de la dater du début du Néolithique moyen (4500 - 4000 ans avant notre ère). De nombreuses fosses initialement destinées au stockage des céréales y ont servi de poubelle après leur abandon. D’autres creusements sont des trous de poteaux liés à des édifices, maisons ou greniers).
Un vaste enclos circulaire d’un diamètre d’environ 40 m et doté d’une palissade est aussi présent. Il s’agit d’une structure unique dans le contexte Néolithique moyen de la région. Il aurait pu servir à protéger le cheptel.
Enfin, des tombes, disséminées au sein de l’habitat, ont été fouillées.
Une découverte intéressante et rare, car les tombes retrouvées datant de cette époque se situent dans des grottes. Fait assez normal, car les grottes ont été finalement peu habitées durant les millénaires, quand les plaines étaient elles habitées. Fouiller des vestiges dans une grotte reste aisée, comparé à la plaine, où se trouvent par-dessus, plusieurs mètres de terres, gravats, etc. champs et villes ! Il est évident qu'on trouverait des tombes néolithiques sous nos grandes villes, mais les fouilles y sont rares... à l'occasion de création de parkings souterrains peut-être, en archéologie préventive (combien de tombes, sites, artefacts remblayés rapidement pour y faire pousser des autoroutes et bâtiments !).
Reste l'image d'Epinal d'un homme européen du néolithique, à moitié nu, les deux pieds dans la merde, bouffant des souris dans une grotte...
Quand à cette même époque Ötzi l'Alpin portait tatouages d'animaux et de points d'acupuncture sur le corps, des souliers en peau de bétail et voyageait sur les glaciers !
Commentaires
Tiens c'est marrant, ici quand ils ont construit un parking sous-terrain sous un ancien cloitre qui sert maintenant de lieu à des manifestations culturelles (concerts de merde, fêtes de jeanne d'arc, brocante aux livres...), ils ont trouvé des tombes. je sais plus trop de quand par contre, mais c'était soit moyen-âge soit antiquité , c'est moins old school que le néolithique (c'est vrai qu'on a encore cette image des hommes des cavernes poilus et barbus qui faisaient HOU!HOU! en bouffant des racines crevées)...
Bref du coup ils ont tout rassemblé en vrac et foutu les ossements dans une fosse commune je sais pas où. Orléans style quoi...
Tout ça me rappelle un film... Faudrait pas brancher de télé dans l'enceinte du cloitre maintenant, ni ouvrir le placard...
Orléans est une vieille ville... Cenabum, fondée par les Gaulois nous dit-on. Oui, mais les Gaulois ont remplacé la population autochtone... Comme nombre de villes, Orléans s'est installée le long d'une rivière. On peut parier que des populations du néolithique s'y étaient installées, sans trop prendre de risques.
Je ne sais plus de combien de mètres s'élève une ville au fil des siècles... puisque les populations construisaient par-dessus les restes des autres populations...
Ton ancien cloître doit dater du Moyen-Age, donc les tombes en dessous peuvent dater du Moyen-Age, ou de l'époque mérovingienne... (chez moi ils ont trouvé des tombes mérovingiennes lors de la construction d'une mediathèque), ou d'avant !
Et pour rester encore chez moi, l'église actuelle a été construite par-dessus une première église, qui elle devait avoir été construite au-dessus ou en lieu et place d'un temple gallo-romain, construit sur un emplacement naturel révéré par les autochtones !
Ah ça par contre oui. C'est une ville qui a toute une histoire ! La politique municipale est d'axer sur le Moyen-Âge car ça va avec tout le folklore Jeanne d'Arc et compagnie, mais en fait, il y avait déja des gens pendant l'antiquité, et probablement avant, comme tu le soulignes.
Je pense qu'effectivement ces tombes datent du MA vu la localisation et la profondeur surtout. Il faut voir qu'en parallèle des fouilles ont mis à jour des ruines du Moyen-Âge, une ancienne tour de garde à côté de la cathédrale (c'est à 100m de l'ancien cimetière dont je parle).
La question c'est que ca faisait plus ossuaire que cimetière dans la mesure où ça ressemblait beaucoup aux catacombes de Paris, donc je sais pas si au MA ça se faisait, là j'avoue je suis un peu une tanche en histoire médiévale, à la fac je m'intéressait qu'aux cours qui parlaient des nazis, ha ha...
Oui pour ce que tu dis de l'église, c'est pas surprenant, c'est une grande constante que de construire un lieu de culte par dessus un lieu de culte d'un précédent culte...
Ici la médiathèque a remplacé l'ancien commissariat de police... Comme quoi...
Oui c'est une constante que de découvrir enfoui des sites à travers toute l'Europe.
Suffit de penser aux travaux pour les tgv.
Le coup d'Orléans me fait penser à Barcelone où en plein centre ville ils ont découvert un cimetière romain en voulant faire un parking, on peut le voir en l'état et il se trouve 5-7 mètres en dessous du niveau actuel.
Pareil sous le palais de l'Archevêque de Barcelone, on peut se promener et voir les ruelles et greniers à raisins du temps des romains, ça vaut le coup si vous visitez la ville et si vous aimez les vieilles pierres.
A Paris idem, sous la cathédrale on trouve les fondations de l'ancienne basilique construite sur un ancien lieu de culte gallo-romain et les ruelles du temps de la fin de l'Empire si je dis pas de connerie.
Toutes les églises romanes avant la grande peste du 14e siècle sont majoritairement construites sur d'anciens lieux païens sauf celles construites par les Templiers qui eux recherchaient d'autres emplacements.