Oui je suis assez fan de James Ellroy. Quand je tombe sur un de ses bouquins, je le prends et je le lis. Bon, je ne cherche pas absolument à tout avoir, mais quand je tombe dessus... je prends.
Et là j'ai lu Lune Sanglante. A peu près un an après avoir chopé le livre, j'avoue... Pourquoi ? la couv, avec la gueule de James Woods. Le film avait été adapté au cinoche, et y a quoi, deux trois ans, j'avais enregistré le film quand il était passé à la télé (avec un magnétoscope, ouais, le vieux réflexe, mais vu comment tout a changé, juste dire "enregistrer sur un magnétoscope", on a l'impression qu'un monde est passé par là).
Donc ouais j'avais enregistré le film, mais bon... je m'étais vite arrêté. J'adore LA Confidential, autant le film que le bouquin, et le Dahlia Noir, que j'ai suivi à moitié pour cause zapping effrené, ben c'était autre chose. Du coup... je n'avais regardé que 15 minutes à tout péter de Lune Sanglante.
La raison pour laquelle j'ai mis de côté ce même bouquin, au profit d'autres.
Faut reconnaître que je n'aurais pas dû me laisser influencer comme ça. Lune Sanglante fait partie de la trilogie Lloyd Hopkins, et il est meilleur que la Colline aux Suicidés. On retrouve tout ce qu'on aime dans cet Ellroy, du meurtre bien crade, des couches sociales basses et crapuleuses, mélange de Noirs, Mexicains, paumés, drogués, pédés, prostituées... des flics bien racistes et expéditifs, et un serial killer tordu comme une barre de fer dans une fête foraine. Relativement classique toutefois, je ferai moins long sur ce bouquin que pour un Tueur sur la Route.
La raison qui me pousse à faire une note, c'est plutôt le film. Car oui, après avoir dévoré le bouquin, je me suis refait le film. Et là, c'est pas la même satisfaction. Le film date de 1988, et le traitement n'est pas du tout le même que pour LA Confidential ou le Dahlia Noir. Non, c'est plus un téléfilm qu'on a là, et pour tout dire... un immense gâchis, vu le matériau de base. Alors y a James Woods, qu'il faut sauver, car il incarne très bien ce flic acharné à la recherche du tueur, mais si dans le bouquin Lloyd Hopkins est un flic qui veut trouver ce salaud et rétablir la justice, même s'il faut en finir et le buter car il n'est plus de châtiment possible autre que celui qu'il assènera, dans le film, il devient un vigilante qui bute à tout va, et sans gros problème de hiérarchie... Le tueur lui-même, un cinglé poète homosexuel psychotique, ne prend qu'une petite place, et n'est dévoilé que durant les dix dernières minutes, sinistre maniaque qui défouraille avec son UZI en invectivant le flic. Autre temps, autres moeurs ? Ouais, à l'époque, on avait pas encore eu le Silence des Agneaux, et la psychologie des assassins, des tueurs qui deviennent les héros du film, côte à côte avec le good guy comme des Janus aux deux visages... On était encore dans une période sevrée aux héros avec un gros flingue, qui a toujours raison, et le méchant qui ne sert au final que de faire-valoir à vider quelques chargeurs et faire péter quelques bidons d'essences... Malheureusement, du James Ellroy, c'est pas un matériau adéquat pour pondre un Piège de Cristal ou une Arme Fatale...
Pour des raisons évidentes, le scénario écrème beaucoup du livre, des passages sont raccourcis, ou abandonnés, plutôt avec succès, mais tout le sel du bouquin, le film passe à côté. Toute la progression qui va aider à découvrir le tueur, et son mobile, le film l'expédie et le rend assez incongru... Pourtant, Ellroy ne prend pas ses lecteurs pour des cons. Il y va à petites doses, il amène le suspens, il nous laisse comprendre avant de dévoiler le pot aux roses...
Dommage donc pour ce film.
Mais tout ceci me rappelle La Fraternité de la Rose, de David Morrell, déjà chroniqué dans nos pages. Un matériau excellent, trahi dans sa version cinématographique. Des livres qui n'ont presque pas vieilli (le seul élément qui a révolutionné les comportements, entre les années 80 et aujourd'hui, c'est le téléphone portable. Les informations passent plus vite pour les flics, et encore, quelques pirouettes peuvent rendre les héros dépourvus de cet outil), mais leur version film, énormément. Lire Lune Sanglante en 2012, ça se tient, mais les images qu'on a dans la tête, elles ne correspondent à un film de 1988. Parce que le cinéma a changé, et qu'on n'imagine plus un film comme on l'imaginait y a 25 ans ? Ou parce que ce film était raté à la base et même moi j'aurais pu faire mieux ?
Commentaires
Je pense qu'il vaut mieux lire un livre et après voir si l'on souhaite la version film. Regarder des films médiocres ou merdiques c'est juste l'horreur, surtout lorsque tu veux lire et là, la gueule des acteurs vampirisent ton imagination. Ca me l'a fait les rares fois où j'ai essayé.
Sinon du Sherlock Holmes pas de problème pour entrer dans la peau des personnages, les différentes adaptations je reste réservé, cela se discute. Quand le film est mauvais il n'y a rien à faire, c'est pareil pour les bédés adaptées, le film passe mieux si le réalisateur à sa propre vision/interprétation.
J'ai pas souvenir d'avoir apprécié un livre en ayant vu le film auparavant et le cas inverse faudrait y réfléchir, peut-être Shining ou Blade Runner qui font figure d'exceptions. Encore que Shining j'ai vu le film après l'avoir lu. Mais le film est différent du roman et Nicholson est énorme haha
En tout cas mon cerveau bloque, les adaptations ciné me font peur, je pense à Dune qui est un pur roman, mais le film m'a fait chialé, putain la gueule que j'ai fait en le matant.
Vaste sujet.
Au fait, ayant une culture nulle en littérature américaine récente, si je devais commencer par Ellroy vaut mieux commencer par un roman type Tueur sur la route ou alors par un cycle ?
Pour les adaptations... ça dépend. Des fois le film est aussi bon, mais faut pas se leurrer, le livre de base n'est alors pas un grand chef d'oeuvre...
Voir le film avant d'avoir lu le roman, ça ne me gêne pas forcément non plus. Bon, l'intrigue en prend un coup, mais ça ne me gêne pas non plus d'avoir la tête d'un acteur sur le héros, en pleine lecture. J'ai pas dû regarder un sherlock holmes en entier, des adaptations des 70's, mais quand j'imagine Sherlock Holmes, il a la ganache de Jeremy Brett.
D'ailleurs les paysages aussi, des fois ça ne me gêne pas de les voir en version cinématographe pour mieux me les représenter à la lecture.
M'enfin, je préfère un réalisateur qui essaye de coller à l'original... les adaptations... tu as vu Solomon Kane ???? HEIN ???? et le nouveau Conan ???? et la connerie qu'ils vont faire avec Agnes de Chastillon ???
Pour en revenir avec Ellroy, les cycles... ils se lisent indépendamment des épisodes, on est pas dans un truc à la Robin Hook... Je trouve qu'Ellroy est bon dans le polar 80's et dans le revival 50's... Tu peux taper dans un Lune Sanglante pour du 80's, idem pour un Tueur sur la Route, et le LA Connefidènechiole pour le vintage des 50's !
Merci pour les titres, je vais suivre tes conseils. Je compte ouvrir une étagère polar, à part les Holmes et deux Agatha Christie, jamais rien lu dans ce genre. Et puis après si je me motive je passerai à A.D.G. et Planchette, cela fait tellement d'années que je lis des articles sur eux mais pas osé faire le saut.
En effet, j'ai pas vu le Solomon ni le nouveau Conan hahaha, j'ai pas osé vu l'avalanche des critiques. Je réserve mes sous pour le prochain Expandables 2.
Tu as raison vaut mieux coller à l'original dans certains cas surtout si le réalisateur a des carences .
Mais certaines adaptations sont réussies, tiens par exemple le Conan de Schwarzy, je connais le film depuis mes 12-13 ans et ce n'est que récemment que j'ai lu les romans, cela ne m'a pas posé problème. Le film garde l'esprit des nouvelles bien qu'il prenne ici ou là des morceaux de l'histoire originale.
Faut dire que Schwarzy a la gueule de l'emploi, donc dans ce cas cela ne m'a pas gêné de me représenter Conan sous ses traits.
Tiens moi je préfère quand les adaptations diffèrent un peu du bouquin justement. Soit parce que le livre est inadaptable en l'état, soit parce que faire une adaptation trop proche rendrait le film barbant. Exemple particulièrement flagrant : Stephen King. TOUTES les adaptations de King trop proches des livres sont nazes, les autres ont été réalisées par des types qui ont LEUR univers (Cronenberg, Carpenter, Kubrick), qui se servent du matériau pour raconter leur histoire... mais là il vaut mieux lire le livre avant en effet, et le lire plusieurs fois, et bien comprendre que si les histoires se ressemblent, elles ne disent pas forcément la même chose (y'a qu'à voir Shining). Après ya des exceptions, genre Simetierre, m'enfin.
Autre exemple : les adaptations de Philip K Dick. Blade Runner, Minority Report, Total Recall (et ouais) : bon, voire très bon, rien à voir ou presque avec les livres. Le reste : assez proches, et pas terribles (Paycheck, eurgh...).
Tu parles de Total Recall... le remake est prêt, la bande annonce est sur youtube... Je sais même pas si les scénaristes ont lu le livre qui est la base... mais vu la bande annonce, ça a l'air merdique...
Je viens de regarder. ça a l'air de reprendre la trame du film de Verhoeven. Mais avec des effets 3D jeu vidéo post Matrix de merde, et sans les répliques cultes de Schwarzie et Benny le chauffeur de taxi impayable, en plus avec Colin "tête de con" Farrel, donc très peu pour moi...
Franchement la nouvelle a quasiment rien à voir avec le film de Verhoeven (qui, malgré le one-man-show d'Arnie et les trois mille coups de feu à la sconde, respecte plutôt bien l'univers parano/politisé de Dick). Elle fait genre trois/quatre pages, il me semble qu'elle est dans le recueil "Minority Report" qui contient d'autres nouvelles adaptées d'ailleurs (la nouvelle-titre donc, celle qui a donné Planète Hurlante, Impostor).
Faut voir que Total Recall, c'est un scénario basé sur la nouvelle de K. Dick, mais il a été je crois acheté par Schwarzy début ou milieu 80's, et plusieurs remaniements sont passés par là. Toujours est-il que le film de Verhoeven est une perle, avec sa propre patte, et il se suffit bien à lui-même. On ne sait tjrs pas s'il est dans son rêve chez Rekall, ou s'il était bien cet enfoiré d'Hauser... tu te casses sur Mars... tu te casses sur Mars.
Putain la première seconde et t'as envie de claquer la gueule de Farrel, lui mettre un taquet derrière la tête pour le décoiffer, et en même temps bien appuyé pour lui déplacer une cervicale. Il est capable du bon (In Bruges) comme du mauvais avec sa tronche, mais pffff, dans le rôle de Schwarzy non franchement. Sans compter le quota de noir pour le rôle du meilleur ami/sidekick, ça devient tellement prévisible et lisse...
get your ass on mars !
en fait total recall, les droits avaient été achetés par Dino de Laurentiis (ouais, le mec qui a aussi acheté les droits de Dune...). Donc déja, c'était pas super bien engagé. David Cronenberg a bossé sur le projet pendant un temps, ensuite, quand il en a eu marre des crises de Dino de Mégalorentiis, il s'est barré faire La mouche, le projet a traîné, traîné... ensuite je ne sais pas bien comment ça s'est machiné mais bon Verhoeven qui avait eu son petit succès notamment avec Robocop, et Schwarzie de son côté, et paf.
Je suis d'accord, le film est excellent, Schwarzie et Sharon Stone sont géniaux, Ironsmith est extra comme d'hab, les répliques sont fendardes ("tu es un héros fiston !" "va te faire foutre" "sois pas modeste" ha ha !) et on est totalement dans l'univers de Verhoeven (ultra violent, cynique, subversif au possible), mais avec un certain respect de l'esprit de la nouvelle (où est la réalité ?). Avec une certaine subtilité dans les rebondissements successifs qui font que ouais, on sait pas si tout ça était réel... dix ans avant Matrix !
Crédibilité zéro pour Farrel qui ne pourra jamais faire oublier Arnie dans le rôle de Doug Quaid. Le black, là, il a l'air de servir à rien, alors que Benny était trop marrant ("j'ai une famille à nourrir !"). ça va être encore un remake de merde avec de l'action bidon, plein de CGI pourrie et, je suis prêt à le parier, un gommage sans pitié de tout l'aspect caustique et poil à gratter du premier film.