Marcel Petiot, docteur ès médecine de son état, mais également maire, conseiller général déchu, est un de nos serial-killers les plus connus.
Ce livre de l'avocat Jean-Marc Varaut nous aide à mieux le connaître.
Si l'on sait ses meurtres à Paris pendant l'Occupation, on sait moins son histoire sur Auxerre. Une enfance déjà marquée par la perversion, le sadisme envers les chats... et ses études de médecine, alors que diagnostiqué psychotique ! Mais Marcel Petiot, c'est une ambivalence permanente. A la limite de l'autisme débile, et en même temps charismatique, hableur, avec un grand sens de la répartie. Pas étonnant donc qu'il devienne maire, et conseiller général.
Mais très tôt, il y a les crimes. Souvent crapuleux, histoire de soutirer quelque argent, ou de se venger. Il est lié à la petite pègre, et règle ses comptes définitivement. Souvent inquiété, il s'en sort toujours. Par un grand sens de la rhétorique, qui le sauve des geôles.
Pourtant il partira à Paris, pour y dispenser ses soins. Il habite au 66 rue Caumartin. Détail amusant, la sombre affaire Méric (un leucémique rachitique mort dans une rixe, après avoir voulu attaquer son adversaire en lâche, par derrière, même pas protégé par le protège-dents qu'il portait) a eu lieu devant le 65 de cette même rue ! Une rue de violence... Claude Seignolle et Guy Breton auraient adoré rapporter ces faits !
A Paris, c'est donc sous l'Occupation que le Dr Petiot professera la majorité de ses crimes, en détroussant des clandestins, leur faisant croire à un réseau de passeurs, mais les empoisonnant... il récupérera de l'argent, des biens, sur ses victimes juives, mais également provenant de la petite pègre. Quant aux corps, il les fit fondre à la chaux vive, ou alimenta sa chaudière de leurs membres. C'est d'ailleurs ce qui mettra au grand jour ses agissements. D'un brutal pied de nez, ou d'un majeur tendu, Petiot se fait passer pour un résistant pour échapper aux flics, et rejoint réellement la résistance, et traque les collabos durant l'Epuration ! C'est son arrogance qui le perdra, quand, très classiquement, les flics feront paraître des énormités sur son compte dans les journaux.
Et pourtant Petiot se défendra, en mêlant toujours le vrai et le faux. Oui il a tué des gens, mais c'étaient des boches, des collabos. Il faisait partie d'un réseau de résistants. Et dans une période où les Vichystes sont encore aux manettes, même si cachés, il refuse de donner les noms et les détails de son groupe.
Grosse difficulté pour l'accusation, car à cette époque, comment démêler le vrai du faux ? Contrairement à la légende que nous connaissons maintenant, apprise de force à l'école et par les médias, la résistance, c'est compliqué. Y avait pas que des enfants de choeur pour faire le sale boulot à l'époque. Un sale boulot souvent rémunéré, du coup... le résistant pouvait vite devenir un collabo. Et à la Libération, avec tous ces noms de codes, ces pseudonymes... et les morts qui ne pouvaient plus parler, comment savoir qu'un collabo n'avait pas pris la place d'un résistant pour avoir sa place au soleil ? Inversement, des résistants pouvaient balancer d'autres résistants comme collabos, s'ils n'avaient pas leur carte du parti bolchévique...
Une période trouble, évidemment où le manichéisme n'est certes pas une clé de compréhension.
Malgré sa défense, Petiot finira coupable, et exécuté.
Il aura laissé des morts derrière lui, et des interrogations sur le nombre exact de ses victimes.
Nous l'avons dit, Petiot était un cinoque. De première. On est partagé entre la nécessité de tuer pour voler de l'argent, et sa soif de meurtre, pure et simple. Une perversité qui ressortait également dans son caractère, par une certaine ironie, et un côté vilain plaisantin. Il avait un humour particulier, le Petiot. Voler la grosse caisse offerte à un orchestre, pour l'offrir à nouveau, peinte d'une nouvelle couleur... A demi-confesser des crimes tout en jouant sur les mots...
Une véritable tronche, ce Petiot. Un tueur en série de grande classe !
Il y a un film de 1990 avec Michel Serrault, "Docteur Petiot", que j'ai regardé. Ouch. On sent le cinéma français de 1990. Musique insupportable d'accordéon triste (plus triste que la bamba triste !), qui a été la patte du ciné français et ce qui me fait le détester. Peu d'acteurs connus en dehors de Serrault. Le générique précise : "Ce film est librement inspiré de la vie du Docteur Petiot". Merci de la précision ! Parce qu'au début, c'est spécial. Petiot va au cinéma pour voir une espèce de Nosferatu refait pour l'occasion, s'énerve de la véracité du film, finit par rentrer dans le film... Puis chez lui, arrivé en haut de ses escaliers, il laisse tomber une boule à neige qui éclate... Qu'est-ce que sont ces délires de réalisateur qui se prend à faire de l'art et d'essai ??? Stop les gars, un peu de sérieux.
Le film est centré sur la période parisienne de Petiot, pendant et après la guerre. Le film reprend des éléments précis, par petites touches (Petiot est nyctalope, le point de croix de Valenciennes...) mais se distingue sur beaucoup d'autres points. Evidemment on n'échappe pas au pathos du couple juif forcé à fuir (encore que si le film fût fait aujourd'hui, c'eut été pire ! On aurait eu droit à du larmoyant pleurnichard de très mauvais acteurs comme Gad Elmaleh, qui n'a jamais été aussi drôle que dans la Rafle), mais par contre, silence complet sur l'incarcération - et la torture - pendant huit mois à la Gestapo de Petiot (qui lui permit de nourrir quelques liens et d'en apprendre sur la résistance par ses compagnons de cellule). Ca ne gêne pas vraiment le récit, de toute façon. Serrault ressemble assez à Petiot, avec force maquillage, qui au final lui donne un côté blafard théâtresque, une sorte de clin d'oeil au vampire Nosferatu, mais ils auraient franchement pu se passer des cheveux en pointe dans une mode faustienne ou luciférienne, et Petiot sur son vélo la nuit, riant de manière satanique. Oh, à Paris à vélo en hurlant la nuit ?? On se moque de nous là ? Y avait pas un ou deux soldats allemands pour vérifier l'Ausweis ? Gabin et Bourvil se sont bien faits choper, eux !
La femme de Petiot est étonnament jeune et jolie, aussi. Ca ne cadre pas vraiment. Les hommes de main ont disparu pour faire place à une mafia plus sélect, et Petiot passe un peu pour leur homme de main, voire à un moment... pour être au service des Allemands.
Mais bon, le film est assez correct, mais je vous avoue que le rip d'une VHS, avec les images baveuses et une colorimétrie approximative, et ce putain de bruit d'accordéon... rendent le film légèrement glauque. On n'est pas dans le nanar, et à part le début, c'est assez académique... Bon, autant lire le livre de Varaut (ou d'autres) pour se faire une véritable idée de qui était l'horrible Docteur Petiot !